

Gianelli Amedeo
18 yo • Painter, Scultor
Un coup de pinceau et je peux simuler les couleurs de la vie.

Le pinceau entre les doigts, une tendre innocence qui le rend si bon. Des traits fins, légers, comme une délicate candeur qui lui ressemble bien. Il est absorbé par son oeuvre teintée des couleurs nostalgiques de cet Arno dont il aimait faire ricocher les galets enfant, retenant son rire dans la nuit.
Il y avait quelque chose de doux comme une susceptibilité qu’on n’avait pas réussi à saisir, une teinte de jaune, puis un milliard de petits points comme des lumières dans l'obscurité de la scène qui éclair leur visages souriants. Des reflets floues dans l’eau. Et tout s’efface, comme si ce n’était que le songe d’une vie. D’un coup de pinceau, il a changé les images qui le hantent. D’un coup de pinceau, il se dessine une nouvelle histoire. Mais qui est-il, ce garçon à la chevelure sauvage ? Celui dont on ne connaît pas la couleur du regard, a-t-il vu de quelles couleurs est la vie, porté uniquement sur la toile blanche ? Peindra-t-il son monde en noir ? Un matin, j’ai entendu le timbre de sa voix, légèrement granuleux, ardent, une voix qui porte malgré qu’il essaye de se faire minuscule. Alors, il ne parle pas, il ne peut plus parler parce qu’il voulait rester transparent. Mais il est opaque.
OPAQUE
Son roux tranchant, son corps svelte couvert de petites tâches de rousseurs, toiles et trépied sous le bras, il marche. Il a tant de prestance qu’on ne peut le manquer, et quand son regard se pose sur nous, on est sous le charme parce qu’il a ses yeux profonds comme une forêt sans fin. Le bois souple, le vent souffle, mais lui, c’est un indomptable, il ne s’assouplit pas, peu importe si c’est une brise qui passe ou un ouragan. Il ne bouge pas. Il vit dans un monde à part, un monde qu’on aimerait connaître. Mais voilà le problème, c’est qu’il ne montre rien. On n’arrive pas à comprendre ce que son pinceau essaye de peindre. Comme si les paysages avaient un sens quand la vie, la beauté, le désir n’en ont pas. Et le monde est uniforme. Et le monde n’a pas de couleur à ses yeux, parce que la vie est triste dans ce malheureux pays qui n’a plus de tête.
OPAQUE

Ses doigts glissent sur la toile, mélangeant les couleurs de son esprit embrumé par les touchées lubriques du papier à grain. Il dessine sur les courbes de la toile un sentiment d’extase qu’il ne connaissait pas jusque là. Et pourtant, c’était comme si il l’avait toujours porté en lui, que sur le cadre idyllique de cette peinture qu’il ne contrôlait plus, qu’il serrait fort contre lui pour que les couleurs imprègnent son être, il avait perdu le sens du monde en noir et blanc. Il mouvait ses doigts pour essayer de peintre un peu plus ce qui perdait de sa valeur. Mais rien à faire, le plaisir finissait toujours par s’estomper : le monde a perdu les couleurs vives de ses moments qu’on pensait inoubliable. Mais la sensualité d’un instant vivra à jamais dans le papier d’une nuit, son corps blotti contre son oeuvre, l’oeuvre de sa vie. Son coeur contre le rouge. Ses yeux posés sur les couleurs plus obscurcit pour en décerné leurs lumières. Le vert à jamais perdu dans l’encre noir, se questionnant sur sa véritable couleur. Mais il ne voit pas.
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Qui est-il ce garçon qui a perdu cette lumière dans ses yeux ? Qui est-il ce garçon coloré mais pourtant blanchâtre qui ne demande qu’à ce qu’on lui peigne la vie sur sa pauvre peau pâle, couvert de taches comparable à de la poussière d’étoiles. Parce que dans la raideur, on lui a trouvé de la tendresse, comme un regard d’enfant qui a grandit trop vite. Parce dans l’impassibilité, on lui a trouvé une innocente sensibilité comme un enfant qui n’a jamais grandit. Parce qu’il était un paradoxe perdu dans le calque d’un monde que personne n’arrive à percevoir. Il n’existe pas. Il n’y a rien hormis les courbes étranges de ses doigts qui ont un jour glissés sur les toiles dénués de sens. Mais ils se sont rencontrés ici, et là, et puis sans doute par là aussi. Là où la peinture naît, il y avait vu un visage d’un soir. Il n’existe pourtant pas. Le fantôme d’un homme qui n’apparaîtra jamais. Mais il n’est pas fou. Il avait entendu les toiles tombées sous les violentes bourrasques de sa présence, le poussant contre les murs pour déposer des courants d’airs violents contre ses lèvres. Il n’était pas fou parce qu’il avait vu les toiles trouées par ce tumulte passionné que personne ne peut contrôlé. Mais plus rien n’existe, et voilà qu’il passait pour un ivre. Un peintre qui ne sait pas peindre. Un amoureux qui ne sait pas aimer. La passion d’un instant qu’il recherche dans la malsaine sensualité des heures perdues à n’être personne.
Sur les murs, sur le sol, dans son lit et peut-être même dans l’eau, il avait jeté de la peinture pour couvrir ce qui se devait de disparaître. Parce qu’il ne voyait pas et pourtant il en voyait déjà trop. Il est fou, mais il se tue en restant à jamais une toile impénétrable. Mais n’a-t-elle pas déjà été colorée par la jolie teinte rouge d’un feu qui ne s’éteindra donc jamais ? Il s’étend, le brûle et tout son être n’est rien de plus qu’un tas de cendre. Mais il utilisera alors les cendres pour teindre en noir les couleurs qui l’ont brisé. Adieu le vert. Adieu le bleu. Adieu cette harmonieuse nature qui s’est peinte jusqu’à que leurs doigts ne soient plus capable de tenir un pinceau. C’est le plus courageux qui l’a tenue trop longtemps. Mais c’est le plus aimant qui n’en a jamais cédé. Le monde est gris. Parce que la forêt brûle et que l’eau n’est rien de plus qu’un amas de déchets, un poison qui s’introduit malgré son consentement, qui le dévore et le pénètre. Mais il est trop tard, l’eau circule contre son être.

Et le pinceau perd de sa ardeur. Mais qui est le véritable peintre quand le pinceau semble être celui qui mène la danse sur le papier ? Qui est le vrai talent si l’homme s’arrête subitement de peindre avec ses doigts ? Une passion amer, des couleurs qu’il ne connaît pas. Mais il se souviendra toujours du noir qui n’en a jamais été un. Il ne se rappellera des blancs qui sont toujours devenu les nuances de gris de cette rencontre futile qui engendre les déchéances et les transes. Des nuits à s’aimer seul, le regard perdu sur la peinture qui ne sera jamais terminée. Les matinés observant ses lieux qui n’ont jamais été aussi teintées. Il ne restera plus rien. Hormis la gloire d’être l’homme de son chef d’oeuvre : Lui offrir l’immortalité avant la paix ; peindre jusqu’à que le monde reprenne de ses couleurs.
