Volodya Nikolai Lydia
Lily
« On a plus d’autre solution. On a besoin de toi. »
On connaissait son parcours. On savait tous ce qu’il avait fait. On pourrait écrire un bouquin sur sa vie tant elle était remplie. Sa vie disgracieuse dont il avait été le médiator. Il était celui qui remettait finalement les pendules à l’heure, ou peut-être celui qui jouait le plus avec. On pouvait crier son nom, le clamer coupable autant qu’on le désirait. On pouvait chercher, fouiller dans sa poche si il n‘y avait rien, regarder dans ses yeux la culpabilité qui n’était pas ici apparemment. Abracadabra. Lui, il est insaisissable. On comprenait pas le pourquoi du comment, mais il agissait, on avait beau savoir que c’était lui, que cette manière d’agir, il était le seul à s’en servir, on n’arrive pas à comprendre comment il peut continuer à nous échapper. Encore. Toujours. Mais, lui, il avait comprit comment ça fonctionnait. Il savait tout. C’est un professionnel, un maître en la matière : Il tuait comme il respirait. C’était son travail, au quotidien, il se la jouait les faucheurs de vie. Avec cet air de bambin qui semble plus crétin que vilain. C’est un meurtrier, reconnu de tous, piéger par aucun être humain. Faut faire un dessin ?
On se rappelle l’avoir vu quand il était encore haut comme trois pommes. C’gamin, il avait fait les quatre cent coups, mais avant c’était juste de gentils petits vols à l'étalage. C’était quelques menaces en l’air avec un couteau suisse entre les mains. On l’appelait parfois l’éplucheur de pomme professionnel. Mais, qui aurait cru que son père adoptif était un psychopathe ?
Et qui aurait cru à un moment que l’enfant en était sorti plus joyeux que traumatisé. Ouais, son papa, on l’avait mit en cage, loin de la vie qu’il illuminait comme il s’amusait de jouir de l’enfant dont il avait été le plus fière. Dans la rue, il était fière d’être le père de ce garçon là. P’être parce que c’était son gamin le premier à l’avoir aider à nourrir son envie de sang. On l’savait pas avant, mais on avait fini par le comprendre : C’était l’enfant qui ramenait volontairement des innocents chez son tendre parent. On pouvait l’dire, ils s’étaient bien trouvé ses deux là. Une histoire heureuse qui cache finalement une ribambelle de cadavres. Et si seulement ça n’avait été que ça, peut-être que si l’adolescent n’avait pas été victime de dit viole, qui finalement ne l’était pas, de violence, qui finalement était des marques d’un amour brutal, alors il serait aussi derrière les barreaux aujourd’hui. Mais nan, lui, il était encore en liberté. Bien plus dangereux qu'auparavant. Avec la meilleure des couvertures. “J’suis un pauvre gamin qui a été victime de son méchant papa” qu’il disait. Faut croire qu’il se payait juste nos têtes.
Il n’avait même pas encore dix-huit ans, il n’était même pas encore réellement parmi le monde des grands qu’il s’y était introduit quand même.
Lui qui avait bien conscience d’être un assassin, lui qui n’avait finalement aucune limite, aucune moral, aucune empathie, il était devenu le pire des nettoyeurs, le plus cruel des tueurs à gage. Ouais, on a tenté de le coincé, au début, on cherchait à trouver des coupables partout sans même remarquer qu’il était là. On voulait pas accuser un mioche. Mais on finit par ouvrir les yeux. C’était pas un malade, il faisait juste ce en quoi il était doué. Il avait conscience qu’il tuait, et ça ne l’empêchait pas de vivre. Au contraire, c’était tuer qui lui permettait de vivre. Sauf que même en sachant que c’était lui, on avait été incapable de le coincer. Comment faisait-il ? Ce p’tain gamin, il avait un talent inné. Le blondinet, avec sa p’tite tête d’ange, on le trouvait tellement morbide, on venait même à le craindre. Ouais, nous, l’escouade de police secrète. On avait peur d’un foutu gamin parce qu’il nous avait niqué la gueule. Et qu’aujourd’hui encore, même après 9 ans, il se fout encore de nos étoiles, nos grades ou juste du fait qu’on soit trop con pour le coincer.
Volodya Stanislas, on lui avait demandé plus d’une centaine de fois comment était son gamin. C’était quoi les habitudes de ce mioche, comment il agissait pour qu’on le coince jamais. Mais, c’était qu’un salopard. On ne le supportait pas, mais il était le seul à être capable de nous aider à coincer son meurtrier de fils. Tu veux que je le lise les rapports qu’on en a fait ? Tu verrais, c’est vraiment pas du jolie. Il se moquait autant de nous que le faisait son gamin. Il nous faisait des descriptions idéalisées de son joyaux, de la quintessence de la beauté : Un visage assez fin, une peau douce, un corps qu’on aimait toucher, des yeux bleu comme pouvait l’être le ciel, des cheveux blonds, fins, soyeux. Des mains délicates, qui se veulent protectrices, qui aiment, qui plaisent. Des lèvres qu’on veut posséder, un sourire qu’on veut chérir. C’était un ange protecteur, c’était ce qu’il nous disait. L’pire, c’est qu’il était tellement passionné qu’on avait envie d’y croire. On voulait croire que ce gamin était tombé du ciel. Mais, on redescendait aussitôt quand on apprenait que quelqu’un d’autre était introuvable. C’était ça la réalité.
L’angelot, son père il lui avait prit à réfléchir. Rapidement. Et à agir. Avec vivacité. Il lui avait appris à être discret, mais fallait croire qu’il était plus du genre à ne pas savoir se cacher. Vantard, il l’était complètement et ça m’rend dingue rien qu’dit penser. Putain, tu l’aurais vu avec son p’tit sourire d’enculer, j’te jure, il y avait de quoi devenir rouge de colère. Il prenait plaisir à nous voir creuser dans de la boue, à nous voir patauger bêtement. Mais, t’sais, en 9 ans, on a plus appris à le connaître que certains de nos collègues. Et, c’était surprenant, mais dans les propos de son père, il n’y avait pas que de la connerie. Ouais, difficile à croire, mais combien fois il nous a dit que l’bambin était affectif, souriant, extraverti voir même gentil et qu’on a pas voulu le croire. Il nous avait expliqué à quel point il était talentueux, à quel point il s'efforçait de faire au mieux. On trouvait ça stupide, parce qu’un meurtrier, c’est finalement quelqu’un qui n’a pas essayé. Non, en fait, on avait juste rien compris. On avait pas saisi que si il s’était mit à tuer, lui, c’était parce qu’il avait besoin d’un p’tain toit. Tu rends compte ?
Il est devenu meurtrier pour être payer, pour avoir à manger, pour pouvoir continuer à garder la maison de son p’pa. On s’rend pas compte à quel point il avait pu se montrer loyal et investit, mais surtout matérialiste, attaché à la valeur sentimental d’un objet, d’un bien ou d’un lieu. En fait, c’est ce jour là qu’on a vraiment réalisé qu’on avait affaire à un humain et pas à une machine à tuer. Cet enfant, il n’était pas comme son père. Ce meurtrier, c’était un enfant avec des sentiments, des envies, et surtout, il voulait vivre.
Bon, il est sans doute devenu un peu vénal vu qu’il agit principalement pour l’argent, mais c’est vrai qu’après avoir compris ça, on a saisi qu’on cherchait pas assez loin. Alors on a chercher à attraper ceux qui l’employait. Mais rien, on a trouvé aucune conspiration étrange en lien avec lui. On en a déduit qu’il travaillait seul, qu’il s’était fait avec de la patience sa propre clientèle, sa propre réputation. Parce qu’en plus d’être travailleur, il est perspicace et optimiste. Confiant en supplément. Mais ça, on l’est sûrement quand on tue des gens. Il est finalement assez indépendant à présent, agissant pour lui, ouais, il est égoïste entre autre. Complètement buté. Extrêmement condescendant. Beaucoup trop inventif. Ouais, clairement, il est chiant. Et pas qu’un peu. Imprévisible de mes deux... C’est qu’en plus de ça, il calcule tout ses coups à l’avance ! Vraiment, il me rend dingue.
Incoercible. On pourra pas trouver meilleur pour le définir. On l’arrête pas. Qu’importe le sens d’arrêter, ce gars est juste impossible à calmer ou à coincer. Parce que derrière ses airs joueurs, se cache un sacré stratège et surtout, qui hormis pendant ses heures de travail est d’une extrême nonchalance, se montre d'une intelligence remarquable. Comment je le sais ? Va savoir, je connais mieux sa vie à présent que celle de mon propre gamin. Tu veux savoir un truc marrant ? C’est qu’il a beau être méticuleux, ne laisser aucune trace, c’est quelqu’un qui chez lui, est hyper bordélique, distrait et de complètement irresponsable ! Nan mais t’y crois toi que ce gars, quand tu passes la porte de chez lui se montre convivial, chaleureux, agréable ? Parfois, j’en oublierais presque qu’il a tué plus de personnes que j’en ai croisé dans ma vie. Il est vachement détendu, en plus d’être extraverti. Irrationnel, surtout. A croire qu’il n’y a pas de logique avec lui. Nan mais à quel moment quelqu’un d’aussi excentrique et marginal que lui peut-il penser et vivre aussi simplement ? Il s’prend jamais la tête. Et moi ça me choque presque.
Ouais, c’est vrai que j’le connais bien. C’est vrai que ça ne relève plus de la simple enquête. Mais si je te disais la vérité, tu m’croirais pas. Mais je suppose que tu veux quand même savoir. Ouais, forcément, à vrai dire, on pourrait presque que dire que je suis devenu son ami. Tu te rends compte ? J’ai passé le seuil de sa porte dans l’espoir de trouver des preuves, et je me suis retrouvé à parler de ma femme ou même l’écouter me parler du fait qu’il soit superstitieux. Si tu veux, je me suis vite rendu compte qu’il faisait parfaitement la part des choses entre sa vie et son dit travail.
Ouais, il est pas comme son père, si son père vivait pour tuer, lui, il était plus du genre à tuer afin de vivre. J’crois que ça l'effraie l’idée de se retrouver seul, sans rien. Alors il a simplement fait ce qu’on lui avait enseigné : Tuer. Ouais, dans l'fond, j’le déteste pas vraiment, j’aurais presque de l’empathie pour lui. J’dis bien presque. Parce qu’il a beau être quelqu’un de brave, de téméraire et d’amusant à sa manière. Il a beau être cynique, régulièrement dans le sarcasme, sûrement prêt à jouer avec le feu par loyauté. Je sais qu’il est quelqu’un qui agit avec impassibilité, tel un robot sans coeur. Il est cruel. Détaché de tout sentiment d’empathie, désintéressé de la vie des autres et ce que leur mort peut causer pour des personnes qui espéraient les voir le lendemain.
Cependant. J’me suis dit, quitte à pas réussir à le coincer, autant en faire un allié. T’sais, tu vas le trouver autant casse pied que vital. Tu vas t’arracher des cheveux, mais j’tai dit qu’il était du genre papa poule ? Ouais, on comprend pas trop comment il fonctionne, on a peut-être oublié de nous donner un mode d’emploi. Mais, tu sais, entre son problème et cette conspiration criminelle qui agit à des fins moins honnête, j’me suis dit qu’ainsi je pourrais faire une pierre deux coups. Et puis, quoi de mieux que de combattre le feu par le feu ? Avec nous, il aura un boulot, il aura un salaire, mais il agira enfin pour faire quelque chose de bien. J’crois que c’était de ça qu’il avait besoin. Je te présente Volodya Nikolai Lydia, notre nouvel agent. Mais, il me semble qu’il préfère quand on le surnomme Lily. C’est plus simple, plus court, et d’après lui plus agréable au niveau de la phonétique. Le soucis du détail hein.
« Le droit de vivre, Nikolai. »
« Et j’y gagne quoi ? »